Le poste d’assistante dentaire est devenu à l’aube de 2023 un élément incontournable du cabinet dentaire diront certains. Et pourtant en 2020, on pouvait constater un turn-over important dans cette profession. Est-ce lié à la qualité de vie ou au modèle de management dans les cabinets ? Il y aurait-il un problème de perspectives d’évolution ? Le fameux binôme chirurgien- dentiste / Assistante serait-il en péril ?
Qu’est ce qui a changé depuis l’apparition aux Etats Unis de la première assistante ou « dame de garde » dans le cabinet du dentiste pionnier C. Edmund Kells (1856 – 1928) père de la radiologie dentaire, à la Nouvelle Orléans ?
Le sort de l’assistante dentaire va être très vite lié à celui du chirurgien-dentiste puis du docteur en chirurgie dentaire ?
Le rôle de l’assistante dentaire entre 1945 et 1990
En Europe et plus précisément en France, tout à vraiment bougé dans l’Art dentaire en 1945. C’est la création de la sécurité sociale et aussi par ordonnance, de la nomenclature des actes professionnels.
L’assistante sera pendant très longtemps une secrétaire en charge de la prise de rendez -vous, de l’administratif et même parfois du ménage, dans le cabinet. Et avec un beau sourire pour l’accueil du patient !
En 1968, la formation des chirurgiens-dentistes passe sous la responsabilité de l’état et l’on va assister ; grâce à la pression du législateur et au perfectionnement de l’enseignement ; à une évolution de la structure dentaire et du matériel la composant.
Le dentiste va se retrouver assis près du fauteuil et donc à distance de certains instruments et petits matériels. Les exigences en matière d’hygiène commencent à poindre, même si les nettoyages et désinfections se font toujours à froid et à la main. La secrétaire – assistante va donc venir dans la salle de soins ponctuellement à la demande du praticien.
En revanche, là où ; dans les années 70 on instaure le PCEM afin de diplômer les candidats chirurgiens-dentistes, pour ensuite définir les conditions d’exercice de ces derniers ; le cas des assistantes n’est toujours pas considéré.
Il faudra attendre les années 80, pour que l’ergonomie dans le cabinet devienne un sujet digne d’intérêt et que par conséquent, le rôle de l’assistante évolue.
Se rapprochant du fauteuil elle continue à assurer les tâches administratives, tout en réassortissant la petite instrumentation dans les meubles dentaires, après nettoyage. Elle installe le patient et spatule ou malaxe des matériaux à la demande du praticien. On commence tout juste à parler du travail à quatre mains au fauteuil. Durant les années 70 à fin 80, toute une population de femmes, avec des expériences professionnelles très variées ; va être formée « sur le tas » par leurs patrons-dentistes.
La tendance étant de leur faire cumuler un maximum de tâches. Ces assistantes étant en plus confrontées aux problèmes de stérilisation de plus en plus normée.
Elles doivent s’accommoder des habitudes de travail du praticien et appliquer les consignes sans forcément être impliquées dans les objectifs thérapeutiques.
Evolutions pour l’assistante dentaire et travail à quatre mains
Ce n’est qu’a partir du 17 Janvier 1992, date à laquelle le code de santé publique inclus dans la convention collective nationale des cabinets dentaires, le statut d’assistants ou d’assistantes dentaires ; que s’ouvrent de nouveaux horizons. Mais il faudra encore attendre, le 1° décembre 2016 (Décret de modernisation du système de santé général) pour assister à la description de ce statut, en déterminant à la fois les fonctions des assistantes mais aussi en créant un diplôme professionnel et en précisant ses conditions d’obtention.
Décret N° 2016-1646 : « l’assistance du chirurgien-dentiste dans le champ de la médecine bucco-dentaire dans la réalisation des gestes avant, pendant et après les soins, l’accueil des patients et la communication à leur attention, l’information et l’éducation des patients dans le champ de la santé bucco-dentaire, l’entretien de l’environnement des soins, des matériels liés aux activités et la gestion du risque infectieux-la gestion et le suivi du dossier patient, le recueil, la transmission des informations, la mise en œuvre de la traçabilité dans la cadre de la structure de soins. Tout cela sous la responsabilité et le contrôle effectif du chirurgien-dentiste ou du médecin stomato ».
Il est intéressant de noter que la première phrase, en décrivant précisément ce qu’est le travail à quatre mains au fauteuil, fait plus que suggérer ce qui va représenter pour des générations d’assistantes, le summum en termes de perspective d’évolution. Vont alors se mettre en place des voies de formations professionnelles au sein des écoles dentaires ou en contrat d’alternance. Les « anciennes » pouvant diversifier leurs expériences et les nouvelles, accéder à la théorie afin de l’appliquer dans la pratique en cabinet. C’est un contrepoint à l’enseignement personnalisé des docteurs en Chirurgie dentaire/ employeurs. L’ergonomie jusqu’alors très peu mise en place dans les structures de soins, commence à interpeller les acteurs du monde dentaire, comme vecteur d’efficacité et de sécurité
Il était temps car l’Art dentaire s’est transformé au fil des années. Le cabinet « artisanal » a muté sous la pression de l’état (décrets et fiscalité) en centre de gestion.
Perspectives du poste d’assistante dentaire
L’enseignement, bien aidé par les scientifiques et les fabricants à « accouché » de nouvelles pratiques et techniques. La technologie et l’informatique, ont révolutionné l’activité de la structure dentaire, tout en réclamant des utilisateurs performants et formés. Les normes d’hygiène et d’asepsie sont devenues incontournables et contrôlables. Sans parler des procédures drastiques pré, per et post-Covid !
Ce n’est que grâce à une assistante au fauteuil que le praticien va pouvoir espérer une maximalisation économique du temps dédié à l’acte sur chaque patient.
Après une longue période ou les assistantes devaient être multitâches et avec le sourire, les cabinets de groupe et leurs économies « d’échelle » ont imposé la notion d’équipe soignante avec plusieurs dentistes mais surtout plusieurs assistantes.
Ce qui a provoqué un éclatement des tâches et une spécialisation des assistantes. Par exemple, en salle d’implantologie, le praticien est souvent en binôme « récurent » avec une assistante dédiée à cette pratique thérapeutique innovante.
Le phénomène de turnover observé chez ces dernières, dont nous avons parlé en introduction et essentiellement dû, parait-il, à l’absence d’accès au travail à quatre mains ; devrait s’estomper à l’aube de 2023.
Dès les années 2010, les premières assistantes diplômées (niveau 1) sont apparues et ont pu progresser au sein des équipes soignantes. Les pratiques de management forcément appliquées dans les structures dentaires qui se veulent performantes, avec plus d’organisation stratégique et de respect de la santé publique, viennent normalement apporter, écoute et qualité de vie. On assiste de plus en plus ; sous la responsabilité et le contrôle des praticiens ; à une délégation de tâches pré et post thérapeutiques aux assistantes.
Bientôt, peut-être et enfin, des assistantes assureront le rôle d’hygiéniste (diplôme niveau 2) au sein des cabinets de groupe. Dans les grands centres dentaires, des assistantes peuvent même espérer assumer des responsabilités d’encadrement et/ou de formation, et ainsi participer à la gestion organisationnelle de la structure.
On peut donc affirmer que l’assistante dentaire est plus que jamais l’élément stratégique du « couple » chirurgien-dentiste /assistante. Dans bien des spécialités du cabinet, elle est la seule voie vers la rentabilité des soins.
Par conséquent, le moral de l’assistante dentaire en 2023 devrait être au beau fixe. Cette dernière étant bien motivée, par une rémunération qui prendra en compte ses capacités professionnelles et lui vaudra la reconnaissance de tous. Et toujours avec le sourire !